mardi 22 septembre 2009

Fast Food

Considérons la musique comme un bien de consommation courante. Culturel, mais finalement, c'est un produit de grande consommation. Difficile à envisager sous cet angle pour les puristes, les artistes, pour qui le fait de réaliser une "oeuvre", aussi modeste soit-elle, est à l'opposé de la boite de petit pois. La charge émotionnelle, personnelle, créative qui vient du fond de soi et qui est à l'origine d'une chanson, d'une photo, d'une sculpture, d'un film, d'un tableau, est à l'opposé de l'usine de mise en boite de la lessive...
... Et pourtant, ça se consomme. Et les modes de consommation de ce produit changent, cela est à l'origine des bouleversements du monde de la musique. Les ventes de disques s'effondrent, la musique devient GRATUITE, cela devient incontestable pour plein de gens. J'ai lu nombre de commentaires sur des articles de quotidiens de tous bords, où il y a une unanimité assez incroyable dans ce sens : les artistes sont perçus comme des gens un peu malmenés, mais bon... ils gagnent tellement de millions que c'est pas 2 mp3 qui vont les mettre sur la paille, ils vont redescendre sur terre. Et la mode devient donc à ne plus acheter de disques, ce produit devient complètement obsolète. Triste constat pour moi qui adore fouiller dans les bacs des petits disquaires, les choses changent.
En fait, les gens viennent à consommer de la musique comme la nourriture : fast-musique comme on va au Mc Do, et de temps en temps on achète un disque comme on va au resto. On mate un clip sur Dailymotion, on fait tourner sur Facebook et demain il aura disparu au profit d'autre chose. Les gens n'écoutent plus d'albums, mais seulement des chansons au coup par coup, mises en vrac dans l'ipod. La durée de vie d'un titre, d'un coup de coeur est de plus en plus courte, les "buzz" ne dure que rarement plus d'une semaine, et c'est dans l'air du temps de consommer de la culture de cette manière. Les gens grignotent.
Du coup, de nouveaux médias sortent, se proposant de concentrer les acteurs musicaux dans de nouveaux médias voués à promouvoir les artistes dans ce monde qui bouge. Le concept de concentration est interressant, évidemment, cela est dans l'air du temps et va dans le sens actuel de l'évolution du business de la musique. Mais il faut voir plus dans le détail comment cela fonctionne, la répartition des taches, le processus qui mène à la promotion de l'artiste. Qui sont les professionnels qui chapeautent l'ensemble ?

Cela m'intéresse car depuis le temps que je suis dans le truc et que je vois comment cela évolue, je suis aussi en train de réfléchir aux nouveaux modes de diffusion. Reste que le centre de tout est la promotion. Créer du buzz, ou faire un travail de fond est souvent synonyme d'investissement, et avant tout financier, car si les vecteurs changent, si les moyens changent, si les modes de consommation changent, je suis sur d'une chose : c'est en investissant qu'on a des retombées. Impossible de promouvoir sans moyens. Cela est possible, mais à une échelle limitée qui ne permet pas à un groupe de se détacher des autres, nous en savons quelque chose.
La problématique dans ce monde de la consommation musicale qui change est donc d'investir au bon endroit, de trouver parmi les milliers de solutions qui s'offrent à un artiste de faire cette promotion les quelques unes qui s'adressent au bon public, qui permet à une information d'être relayée à bon escient. C'est là que ces nouveaux médias ont un rôle à jouer, en étant au centre des acteurs qui font la musique, de pouvoir mettre les gens en relation, d'être un catalyseur.

Mais personne ne sait encore comment doit fonctionner ce catalyseur, et comment il pourra se nourrir d'un système qui génère de moins en moins d'argent. Pour mémoire, manger au Mc Do coûte 5 fois moins cher que dans un bon resto, mais le budget publicitaire est je pense 10 fois plus important rapporté au repas entre un fast food et un resto traditionnel. Et le secret de la pérennité de ce business, c'est de jouer sur la quantité, et pas la qualité : de la bouffe de merde vite mangée, vite digérée, vite chiée, et qui coûte pas cher.
A qui la faute ? Les maisons de disques qui ont cru trouver les poules aux oeufs d'or en sortant des disques pas cher/moisis de la Star Academy et toujours les mêmes best of de Michel Sardou ? Aux millions de cons qui ont acheté ces disques ?
Nous, les gens, nous sommes en train d'adapter ce modèle à l'art et à la musique. Alors : bon appétit.

2 commentaires:

fabdb a dit…

Alors tout ça, la chanson est une industrie parce qu'une poignée d'imbéciles a réussi à être moins conne que le reste! Y'a de quoi se vanter, j'vous jure.

Anonyme a dit…

Cela dit on remarque un retour en force du vinyle dans certains milieux (bien qu'il n'ai jamais disparu dans le jazz ou la musique classique)... Accompagné d'un renouveau des efforts sur le packaging, avec nombre d'éditions limitées vraiment magnifiques qui sont de véritables œuvres d'art pluridisciplinaires (l'édition deluxe de The Incident est hallucinante)...